Ah, là, là ! les amis, si vous saviez, les activités professionnelles d’une bét a fé ne sont pas de tout repos ! J’étais tellement débordée que je n’ai pas eu le temps de vous donner de mes nouvelles. Mais là c’en est trop, exténuée de faire briller la forêt de mille feux, je prends des vacances afin d’éviter le burn out ! Direction les Salines pour me ressourcer et m’amuser.
Après la bronzette et la baignade, je décide de partir en balade afin de trouver de nouvelles amies avec qui me divertir un peu.
Tiens, mais j’entends du bruit sur ce mancenillier en fleur. Qui est là? Il me semble que c’est Mamzel mouche an miel (l’abeille domestique, Apis mellifera) ! Chouette alors ! Avec ses 80 000 sœurs de la colonie on va pouvoir organiser un tournoi de volley !
« -Dites donc madame l’abeille, seriez-vous tentée par une petite partie de Beach volley ?
-Ah là là que crois tu bét à fé, que je suis en vacances, que j’ai le temps de m’amuser ?! Vois tu après la sécheresse les premières fleurs des Salines fleurissent de nouveau, je dois donc récolter du pollen et du nectar pour nourrir le couvain de ma colonie et les hommes par-dessus le marché ! Sais tu que pour produire 1 kg de miel il faut butiner 5.6 millions de fleurs !

-Désolée, je ne vais pas vous déranger plus longtemps. Je continue mon chemin, appréciant le joli paysage des vagues se brisant sur la table du diable. »
Mais que vois-je ?
Il me semble qu’il y a quelqu’un qui prend le soleil. C’est une autre abeille, Centris decolorata. Elle est costaude et rapide celle-ci, on pourrait jouer au frisbee ?
« -Et non mademoiselle, répondit le Centris un peu essoufflé, pas le temps de m’amuser, je viens de finir de creuser mon nid mais je dois encore aménager l’intérieur, y stocker du pollen et du nectar avant de pouvoir y pondre.


-Bon et bien dommage, je continue vers la savane des pétrifications alors. »
Oh là là, il fait chaud ici, j’ai soif…mais il me semble entendre quelqu’un qui se régale. On dirait que ce bruit provient de cette fleur d’Opuntia… Tototo, y a-t-il quelque chose à manger ici ? Vous, ici, Mamzelle Melissodes martinicensis, la seule abeille endémique de Martinique !! Heureuse de vous rencontrer ! J’aimerais bien partager un goûter avec vous, la star des abeilles !
« -Et bien sers toi bét à fè, ce nectar est succulent mais dépêches toi car de nombreuses autres abeilles sont déjà passées, les nectaires sont presque vides. Mais si tu veux, suis-moi, je connais un super resto, les fleurs y sont bien plus abondantes mais il y a foule la plupart du temps.

Nous voici au seul resto ouvert à cette heure de la journée : le petit baume blanc (ou Lantana involucrata). Toutes les abeilles des Salines se retrouvent ici. »
Oh là là, en effet, il y a beaucoup de monde, ça virevolte dans tous les sens, gare au crash aérien ! Tiens, mais j’aperçois au loin une autre petite abeille, Megachile vitraci, elle est vraiment jolie. Comme je l’envie. Et qu’est ce qu’elle est rapide ! »

Rapide oui, mais personne ne va aussi vite que Mesoplia azurea lorsqu’elle se prépare à partir à la recherche des nids de Centris afin d’y pondre.
Oseras-tu te mesurer à elle bét à fé ?
1-2-3 bzz telle une fusée Mesoplia est déjà hors de la vue de la pauvre petite bèt à fé qui commence à désespérer.

« -N’y a-t-il donc personne parmi les abeilles qui accepte de jouer un peu ? Vous ne prenez donc jamais de vacances ? »
Et toutes les abeilles répondirent en cœur :
« -On ne t’a donc jamais raconté les Fables De La Fontaine petite bèt à fé ? Ne sais-tu pas ce qui est arrivé à la cigale qui a chanté tout l’été ? Ni à la grenouille qui faisait de même pendant tout l’hivernage ? Nous les abeilles, nous agissons comme nos amis les fourmis mais tu peux toujours aller faire la fête avec les sauterelles, criquets et autres cri-cri des Salines… »
Bét à fé était vraiment impressionnée par le courage et le sérieux des abeilles. Elle se souvint alors d’un proverbe que sa grand-mère utilisait parfois pour lui dire qu’il faut aussi savoir prendre le temps de vivre. « Ni défen moun, pa ni défen travay » (Les gens meurent, le travail ne meurt pas). Elle se dit alors : « Il ne faut pas se tuer à la tâche, je vais donc finir d’apprécier mes vacances et c’est ensuite avec plaisir, qu’à la rentrée, je reprendrai mon travail. »