Profitant de la venue en Martinique de Sylvain HUGEL, spécialiste des sauterelles, grillons et criquets des Petites Antilles (insectes de l’ordre des orthoptères), l’association a organisé le 8 août une sortie à Fond Baron, sur la route de la Trace, pour découvrir de plus près ces petites bêtes qui font tant de bruits dans nos nuits martiniquaises.
Voici un aperçu de ce que nous a montré et appris Sylvain.

Tout d’abord, qu’est-ce qu’un orthoptère ?


Il existe en Martinique une soixantaine d’espèces d’orthoptères (plusieurs espèces ne sont pas encore décrites et n’ont donc pas de nom scientifique pour le moment) : environ 5 espèces de criquets, une vingtaine de sauterelles et plus de trente espèces de grillons. Quelques belles découvertes sont encore donc à prévoir pour les prochaines années.
Sylvain a pu nous faire découvrir ses techniques pour observer et capturer les sauterelles et grillons qui vivent à Fond Baron :
- La reconnaissance au chant (chaque espèce à son chant spécifique) ;
- La détection des chants grâce à un Bat Detector (qui permet d’écouter les sons de haute fréquence) ;
- L’utilisation d’un filet ou d’un parapluie japonais pour capturer les individus.
Les pièges Barber et les tentes malaises sont aussi parfois utilisés suivant les espèces que l’on souhaite capturer.
A propos du chant :
Seul le mâle est capable d’émettre des sons. Cela lui permet, en fonction des espèces, soit d’attirer à lui les femelles, soit de faire en sorte que la femelle se signale, par exemple en tapant sur son support pour qu’il puisse la rejoindre ensuite. Tout cela se fait bien sûr dans le but de s’accoupler et d’assurer une progéniture.
La puissance du chant n’est pas reliée à la taille des mâles : chez certaines espèces de très petite taille, le chant est bien plus fort que pour certaines espèces de grosses sauterelles !
Une particularité en Martinique et sur les îles voisines est que le chant est régulier tout au long de la nuit, alors que sur le continent (Guyane par exemple), il l’est moins : sûrement pour éviter d’attirer les prédateurs (qui sont moins nombreux chez nous).

Au cours de la marche sur la route forestière de Fond Baron, les sauterelles et grillons ont été au rendez-vous.
Nous avons donc pu rencontrer Neoconocephalus affinis (et son chant caractéristique de cocotte minute), Neoconocephalus maxillosus et Neoconocephalus triops, des sauterelles vertes ou marrons présentes dans les graminées, mais aussi Gryllus assimilis (le grillon commun des Antilles), Microcentrum triangulatum, Agraecia cesairei (nommé en l’honneur d’Aimé Césaire), Anaulacomera sp. et un juvénile de Tafaliscinae.



Nous avons croisé le vrai cabrit-bois (Xerophyllopteryx martinicensis) et son usurpateur d’identité (Mastophyllum scabricolle) : en effet, la grosse sauterelle verte ou brune que nous voyons souvent et que nous prenons pour le cabrit-bois n’est en fait pas celle que l’on croit, car il s’agit de la seconde nommée ! C’est Xerophyllopteryx martinicensis qui est bien celle qui fait ce son si caractéristique du cabrit mais que l’on ne voit presque jamais!
Nous avons pu aussi observer des individus de la famille des Hapithini qui ne sont pas encore décrit pour la science, et entendu des Anaxipha sp., et une courtilière (Gryllotalpa sp.).



Fond Baron nous a aussi réservé quelques autres surprises :
de jeunes Avicularia versicolor tranquillement posées sur des feuilles, de nombreux coléoptères en plein repas (Phyllophaga delplanquei, Diaprepes marginatus, Leucothyreus nolleti, Leucothyreus pinchoni, Lixus sp.), des phasmes se cachant dans la végétation (Paraphanocles keratosqueleton, Clonistria sp.), plusieurs punaises en équilibre sur des graminées (Edessa bifida) et des papillons de nuit nous accompagnant le long du chemin (Letis mycerina).
Après une belle marche, nous sommes rentrés chez nous avec plein d’images que nous pouvons maintenant associer aux sons que nous entendons la nuit.
